mardi 25 février 2014

Et Vian !

Il y a un paradoxe amusant dans le fait que le gouvernement encourage par tous les moyens les citoyens à boire du cognac et à griller de l'herbe puante, et dans le même temps, arrête et condamne les satyres qui ne font en somme que tenter d'exercer une fonction parfaitement normale mais compliquée à plaisir par les préjugés et autres règlements. Ou plutôt, il n'y a pas de paradoxe ; ce sont les deux aspects d'une conspiration pour le nuisible. Car il est parfaitement sain, physiquement parlant, de se livrer avec une partenaire choisie à toutes les possibilités du joyeux mystère, selon la plaisante expression de nos pères ; tandis que l'on attrape des cirrhoses à boire de l'alcool.

[...] puisque l'amour, qui est tout de même, je le répète, le centre d'intérêt de la majorité des gens sains, est barré et entravé par l’État, comment s'étonner que la forme actuelle du mouvement révolutionnaire soit la littérature érotique ?

Oui, les vrais propagandistes d'un ordre nouveau, les vrais apôtres de la révolution future, future et dialectique, comme de bien entendu, sont les auteurs dits licencieux. Lire des livres érotiques, les faire connaître, les écrire, c'est préparer le monde de demain et frayer la voie de la vraie révolution.
  • Ecrits pornographiques précédés de l'Utilité d'une littérature érotique, Boris Vian, éd. Le Livre de Poche, 1980 - Utilité d'une littérature érotique, p. 34 et 35

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